Note de dégustation: Sauvignon blanc 2006, Château Le Rosey, Côteau de Vincy, Suisse

Il faut que je dise un gros merci à Florence, amie graphiste basée à Lausanne et amie d’enfance de ma douce moitié. Me sachant amateur de vin, elle et son mari Olivier m’ont donné très gentiment, lors de mon dernier voyage en Suisse, trois bouteilles de vin vaudois d’un producteur de leur connaissance. Un rosé, un garanoir et un sauvignon blanc du Château Le Rosey, situé à Bursins, entre Genève et Lausanne, au nord du Lac Léman.

Il y a quelques années, j’aurais regardé ça d’un air très dubitatif. Les vins vaudois que j’avais goûté, (suite…)

Des vins valaisans pour la brisolée (et plus) : Gérald Besse, Jean-Louis Mathieu et Jo Gaudard

Depuis que j’ai écrit un petit billet sur la brisolée, il y a bientôt deux ans, les liens se font très nombreux vers cette page d’À chacun sa bouteille, particulièrement du mois d’octobre au mois de décembre, en pleine saison des châtaignes. Tout simple, ce repas de châtaignes grillées accompagnées de fromage est un plat des plus réconfortants et des plus conviviaux, quand la froidure revient. Une spécialité suisse – et en particulier valaisanne – moins connue que la raclette ou la fondue, mais tout aussi agréable.

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Des vignes à perte de vue dans la portion valaisanne de la vallée du Rhône

Même si on s’en fait au moins une fois par hiver, à la maison, la brisolée reste pour moi associée étroitement à mes souvenirs de voyage en Valais, avec les châtaignes grillées sur feu de bois dans une sorte de cylindre troué en fer que l’on tourne périodiquement pour assurer une cuisson égale. Avec une petite touche fumée et caramélisée, un vrai délice.

Voici donc un excellent prétexte pour vous parler de trois vignerons valaisans que j’ai visité en août dernier, lors de mon passage en Suisse en tant que juré du Mondial du pinot noir, un concours où sont jugés plus de 1100 pinots de 24 pays, par une soixantaine de professionnels d’une dizaine de pays. Avec beaucoup de sérieux et d’application, comme j’ai pu le constater. Épatant aussi de voir toute la diversité qu’on peut trouver entre vins d’un même cépage: les nuances de goût, de texture, d’extraction, de mûrissement, d’arômes, d’intensité, de couleur ont voir toutes les nuances du vin. Des nuances qui en font un plaisir et un apprentissages infini.

Le Mondial, c’est à la fois un travail sérieux, organisé avec toute la précision… d’une horlogerie suisse, tiens, et un étalage exceptionnel de l’hospitalité valaisanne, des marches en montagne à la très belle station de Crans-Montana aux dégustations de raclette au Château de Villa, à Sierre, en passant par un repas à l’exceptionnel restaurant gastronomique de Didier de Courten, toujours à Sierre.

Quelques journées où l’on découvre des vins exceptionnels, tant dans le cadre du concours (du grand pinot dans les Sierras de Malaga, en Espagne? Qui l’eût cru.) que lors des repas où les vins valaisans prennent le relais (les cuvées élevées en chêne suisse de chez Rouvinez, l’arvine si vive et intense de Mike et Jean-Charles Favre, pour ne donner que deux exemples parmi tant d’autres).

Déjà que j’étais très fan des délices valaisans…

Le vignoble de Chamoson, en Valais.

Le vignoble de Chamoson, en Valais.

Le pire, c’est qu’après toutes ces bonnes choses et surtout, tout ce vin, j’avais encore des trucs que je tenais à goûter, après la fin du concours. En une courte journée, j’ai donc visité trois domaines: Jean-Louis Mathieu, à Chalais, Jo Gaudard, au Leytron, et Gérald Besse, à Martigny. Trois coins différents du Valais, chacun avec leur terroir, leur ensoleillement et leurs spécialités.

Jean-Louis Mathieu

C’est sur la recommandation d’un ami commun, Daniel Rossellat, que je me suis dirigé vers chez Jean-Louis Mathieu, du côté sud de la vallée du Rhône. De quoi me mettre en confiance, puisque l’ami Daniel sait apprécier les bonnes bouteilles – et les bonnes personnes.

Jean-Louis s’est avéré aussi sympathique que talentueux, affichant une maîtrise calme et une connaissance précise de ses vignes et de ses raisins. Son fendant de Sierre 2008 s’est avéré frais, bien mûr mais aussi bien sec, et animé par une petite touche de gaz carbonique. L’arvine, bien typée, était de bonne ampleur, avec un fruit bien défini et la petite touche saline si distinctive de ce cépage unique au Valais. En rouge, le pinot noir de Chalais se distinguait par un profil très aromatique et une bonne fraîcheur en bouche, tandis que la syrah de Sierre exhalait un très beau poivre blanc sur un fond de fruit rouge et une trame tannique équilibrée. Le Cornalin, avec son fruit ample et enrobant, ses tannins fins et serrés et sa structure nette, est un des plus beaux exemples qu’il m’ait été donné de boire de ce cépage dont le caractère si capricieux explique sa quasi-disparition, il y a deux décennies, du vignoble valaisan. Des vinifications maîtrisées comme celle-ci expliquent par ailleurs pourquoi il effectue un retour apprécié.

Pour le dessert, j’ai également pu goûter au Tulum, un vin d’assemblage réunissant petite arvine, marsanne, malvoisie et muscat, élevés en minimisant l’oxydation, afin d’accentuer la netteté des saveurs et les nuances aromatiques riches des raisins surmaturés. De toute beauté.

Jo Gaudard

L’arrêt chez Jo Gaudard était motivé par la dégustation, lors d’un voyage précédent, d’un très bon cornalin où l’on trouvait un équilibre et une intensité aromatique plus qu’appréciable. Si j’ai bien aimé l’arôme floral de son humagne blanc, ainsi que le côté épicé de son humagne rouge, c’est avec un rosé qu’il m’a vraiment fait sourire. La syrôse est, comme son nom l’indique, un rosé de syrah d’une belle rondeur, avec beaucoup de fruit et de bonheur – et une étiquette très appréciée et même très courue par les médecins, me disait Jo, lors de notre rencontre à la bonne franquette. Avec une étiquette aussi directement anatomique, il y a de quoi amuser bien des gens du domaine de la santé.

Sachant flairer une bonne affaire, Gaudard a fait protéger la marque dans plus d’un pays, avec le projet éventuel de faire de la syrôse dans d’autres régions portées sur la syrah. Un projet intéressant, puisque tout buveur préfère avoir une syrôse qui fait d’un bien, plutôt que l’autre sorte.

Gérald Besse

En fin de journée, je me suis dirigé vers le domaine de Gérald Besse, sur les coteaux encaissés qui bordent Martigny du côté ouest, dans le début de la vallée qui conduit au Val d’Aoste, par le Grand Saint-Bernard. Un endroit de prédilection, pour moi, tant pour son paysage que ses fendants bien minéraux et frais, et toutes les autres bonnes choses qui viennent avec.

Les Besse venaient de revenir de vacances et la visite chez eux s’est faite dans un brouhaha amical que j’ai beaucoup apprécié. Même avec tout le travail qu’une journée de retour suppose, toute la famille s’y est mise pour offrir un accueil de qualité. Patricia, d’abord, puis sa fille Sarah (qui étudie l’oenologie à l’école de Changins), puis Gérald lui-même se sont succédés aux bouteilles, faisant goûter à peu près tout le panorama de leur production, qui couvre près de trente cuvées distinctes, sur deux grandes gammes: les cuvées « traditionnelles », peu ou pas boisées, et Les Serpentines, une série de vins élevés en barrique (mais nommés d’après la pierre serpentine présente dans les coteaux avoisinants.

Voilà un voyage gustatif que j’ai bien apprécié, de bout en bout. Toutes les cuvées sont bien définies, avec une direction correspondant au cépage et au terroir. Deux bonnes pages de notes et beaucoup de plaisir, surtout, à discuter avec ces trois personnes si énergiques et si attachées à leur terroir. Gérald Besse parlait avec beaucoup de fierté de ce domaine constitué graduellement pendant trente ans, à la force du bras. Des années de galère qui rapportent finalement une satisfaction bien méritée, avec 16 hectares de vignobles en terrasse, dont une belle petite parcelle d’ermitage (marsanne) plantée en 1947 par son grand-père Clément qui offre un vin véritablement exceptionnel.

Allons-y pour les dégustations.

Le terroir de Martigny, souvent granitique, avec quelques affleurements calcaires, est un vrai paradis pour le fendant, et ceux de la famille Besse ne font pas exception. Le Fendant Martigny 2008 était minéral, frais et gouleyant, avec la fraîcheur apportée par la pointe de CO2. La cuvée Les Bans 2008, pris dans une parcelle spécifique, était dans le même esprit, mais avec une profondeur et un gras supplémentaires.

Toujours sur Martigny, le Johannisberg 2008 (le nom local du sylvaner) se distinguait par son caractère bien sec et vif, avec de la pierre à fusil et de la cire d’abeille au nez. Très agréable. La petite arvine 2008, travaillée sans fermentation malolactique, embaumait les agrumes, le fruit de la passion et le tilleul et se montrait nette et sèche en bouche. Une approche que j’avais bien apprécié chez Christophe Abbet, l’hiver précédent.

Les gamays 2008, comme les fendants, montraient bien la nature de chaque endroit. Du petit coin de vignes qui s’accroche aux pentes voisines du village de Bovernier, un passage étroit et encaissé de la route du Grand Saint-Bernard, Besse tire un gamay gourmand, qui goûte la confiture de fraise et offre des touches épicées, mais aussi végétales. Du lieu-dit Champortay venait une cuvée minérale (le sol y est plus sur le calcaire), structurée, avec une acidité rafraîchissante et un dez de cèdre et d’épices. Le gamay du Domaine Saint-Théodule, un beau vignoble racheté par Gérald et Patricia Besse en 1993, se montrait plus dense et plus structuré, avec un fruité bien mûr.

J’ai bien apprécié les pinots noirs et les syrahs, qui m’ont aussi donné l’occasion de faire le contraste entre les cuvées avec et sans chêne. D’un vignoble extraordinairement pentu, surnommé le Calvaire à cause de la difficulté d’y travailler la vigne, le pinot noir sans chêne 2008 offre une structure minérale très ferme qui gagnera à s’ouvrir avec le temps. En cuvée Serpentines, le même pinot trouve son fruit monté sur deux rails – un de calcaire, l’autre de chêne – et se révèle bien avec le temps, comme en témoignait le 2006, plus ouvert que le 2007. Côté syrah, le côté fraise au poivre de bien des vins valaisans tirés de ce cépage était au rendez-vous, avec en prime une belle touche de réglisse. Dans ce cas, j’ai préféré le sans chêne, le Serpentines 2007 ayant, avec 60% de fût neuf, une dose assez costaude d’arômes torréfiés et vanillés qui m’ont semblé un peu excessifs.

Les vins de raisins surmaturés sont de très belle qualité, comme en témoignaient une malvoisie 2007 très nette et équilibrée, débordant de pêche et d’abricot, et encore plus la petite arvine 2007, qui fleurait bon l’ananas, l’orange et le caramel au sel, le tout soutenu par l’acidité typique du cépage, avec ainsi un surcroît de fraîcheur.

Mon préféré de toute la dégustation aura toutefois été l’Ermitage Martigny vieille vigne 2007 de la série Les Serpentines, dont je me suis ramené une petite bouteille à la maison, après l’avoir goûté. Les deux fois, je suis tombé totalement sous le charme de ce vin profond et expressif, dont les saveurs intenses s’ouvrent par vagues en bouche et dont le parfum est carrément envoûtant. « À méditer », avais-je écrit dans mes petites notes trop rapides. Et comment.

Pour la brisolée, déjà?

Dans tous ces vins, les fendants et les arvines sont particulièrement appropriés pour la brisolée, qui se marie particulièrement bien aux blancs dotés d’une belle acidité (de Suisse ou d’ailleurs). Un gamay fruité, un pinot bien minéral comme le Calvaire de Besse, ainsi que son Ermitage Les Serpentines, avec son intensité remarquable, pourraient aussi faire le travail. Évitez simplement des rouges trop tanniques et concentrés, qui donnent souvent un arrière-goût métallique au fromage.

Visite en Valais: une magnifique rencontre avec Christophe Abbet

Il me restait un long mot à dire sur une très belle rencontre effectuée pendant mon séjour en Valais, pendant le temps des Fêtes. Une visite à l’échoppe de Christophe Abbet, sur la rue principale de Martigny-Bourg, la vieille partie de cette sympathique ville valaisanne aux lointaines origines gallo-romaines – comme en témoigne entre autres un bel amphithéâtre du IIIe siècle.

Le nom de Christophe était apparu dans mes lectures bloguesques, au cours de la dernière année, en particulier sur le blog d’Olif puis, juste avant de partir vers la Suisse, sur celui de Laurent et de ses Vins confédérés. À la lecture de ces succulentes descriptions, le rendez-vous me semblait obligatoire.

Au téléphone (suite…)

La défense des appellations valaisannes (et une dégustation chez Samuel Saudan)

J’arrive en Valais pour célébrer Noël au beau milieu d’une bataille ferme (en tout cas, selon ce que je lis dans Le Nouvelliste, le quotidien valaisan) entre le canton, où l’on réclame avec insistance un élargissement des appellations d’origine contrôlée (AOC) pour assurer une meilleure mise en valeur de la très riche tradition locale, et les autorités fédérales, où l’on est apparemment beaucoup moins pressé de rendre ces appellations officielles.

A priori, j’ai tendance à donner raison aux Valaisans. Les progrès exceptionnels de la viticulture valaisanne, au fil des deux dernières décennies, ont largement à voir avec la volonté des vignerons (appuyés par les autorités cantonales du Valais, qui ont mis une variété de programmes en place) d’améliorer la qualité et de mettre en valeur les nombreux cépages traditionnels de qualité qui font le patrimoine local.

Le cornalin, l’humagne, la rèze, l’amigne et l’arvine sont autant de cépages (suite…)

Vendredi du Vin 18: La lumière dans le verre

(Note: la synthèse du 18e VdV, avec liens vers les blogues des participants, est en ligne ici)

Pour trouver du pinot qui pinote, conformément au thème que j’avais mis de l’avant pour le 18e retour des Vendredis du vin,  j’ai fini par en boire toute la semaine. Trois bouteilles, au total, à la recherche de ce pinotement (et non de ce pinotage, que peu de vignerons sud-africains savent faire pinoter) qui fait le bonheur du buveur de pinot.

Ça s’est commencé en Suisse, avec le Pinot noir 2006 AOC Chamoson de René Favre Fils. La petite cuvée de ce producteur dont la grande (cuvée), le Renommée Saint-Pierre sait faire compétition (suite…)

Connaissez-vous la brisolée?

Si on connaît bien la fondue (du fromage avec du pain) et la raclette (du fromage avec des pommes de terre), on connaît moins la délicieuse brisolée, qui est une combinaison aussi simple et nourrissante : du fromage avec des châtaignes. Dans les trois cas, il s’agit de recettes de base de la cuisine suisse paysanne, devenues à la longue des repas de fête et de convivialité.

Simple comme bonjour, la recette de la brisolée consiste à faire cuire les châtaignes (suite…)