Le sucré et le fruité: Liano, Bojo et édulcoration des vins

Si vous achetez une bouteille de rouge pour le souper, vous avez probablement l’impression que vous achetez un vin sec. Après tout, les vins desserts comme le porto ou le banyuls, qui gardent une bonne dose de sucre résiduel, sont dans une catégorie différente, sur les rayons de votre caviste préféré (généralement connu au Québec sous le nom de « SAQ »). Même s’il y a du fruit mûr à revendre, dans un vin de table, tout le sucre a été converti en alcool et le vin est donc ce qu’on définit comme sec. N’est-ce pas?

Pas nécessairement. Plusieurs marques populaires au Québec, comme le Ménage à Trois, l’Apothic Red ou les Yellow Tail ont un taux de sucre résiduel assez significatif. On parle souvent de 10 à 15 grammes de sucre par litre (1 à 1.5% de sucre résiduel). C’est comme ajouter deux ou trois cuillerées à thé de sucre à une bouteille de vin – ce qui n’est pas rien. J’en ai eu un exemple assez clair, il y a quelques mois, lors d’un souper de semaine bien ordinaire.

En décembre dernier, j’ai en effet ouvert une bouteille de Liano, un très populaire assemblage de sangiovese (70%) et de cabernet sauvignon (30%) produit en Émilie-Romagne par la maison Umberto Cesari. J’avais reçu le vin en cadeau et j’étais très curieux de le goûter, vu sa popularité au Québec. Disons que mon premier commentaire, sur Twitter, n’a pas été des plus positifs.

Quand j’ai pris ma première gorgée, les enfants m’ont vite demandé ce qui n’allait pas, voyant ma grimace. « C’est sucré », que je leur ai répondu en faisant une moue qui reflétait mon déplaisir. Je n’étais vraiment pas épaté. Plus de 25$ pour ça, un vin sans subtilité, à rendement élevé, produit en masse? Même avec un repas viandeux, supposément bien assorti à un vin plus rond et plus fruité, ça n’allait pas. « C’est pour le dessert, gros bêta », m’a répondu un collègue chroniqueur vins, toujours sur Twitter, en rigolant gentiment de ma réaction.

Effectivement, je continue d’être étonné (suite…)

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Le nebbiolo: c’est un peu plus cher, mais c’est plus que du fruit

Des vignes de nebbiolo, le capricieux roi du Piémont, près de Serralunga d'Alba.

Ça m’est venu en buvant un verre de nebbiolo d’Aldo Conterno, à la mi-décembre. Et comme presque tout ce qui me passe par la tête, je l’ai tweeté:

Et après avoir goûté d’autre nebbiolo durant les Fêtes, cette impression n’a cessé de se confirmer, pour moi: ce qui rend le nebbiolo si intéressant, c’est véritablement parce que, dans toutes ses expressions, des plus complexes et austères aux plus simples et faciles à boire, ce cépage capricieux et subtil ne se résume jamais à une simple dose de fruits. Et c’est pour ça que je l’aime tant.

Des cabernets dominés par le fruit, du gamay dominé par le fruit, même du pinot noir tout sur le fruit, ça se peut très bien. Bien sûr, on trouvera d’autres choses dans la palette aromatique des plus grands, des plus complexes. Mais dans des vins plus courants, des expressions plus simples, on sera facilement, d’abord et avant tout, presque à l’exclusion de toute autre chose, sur le fruit.

Pas avec le nebbiolo. Prenez (suite…)

Published in: on 11 janvier , 2011 at 6:00  Comments (6)  

Les vins les plus populaires au Québec: au-delà de la domination Fuzion

Lundi dernier, Vincent Marissal, chroniqueur à La Presse et grand amateur de vins, publiait le palmarès double des vins meilleurs vendeurs à la SAQ, en 2009. Je dis double parce que l’on y trouve les 10 meilleurs vendeurs par volume (nombre de caisses) et par prix (valeur des ventes en dollars), des catégories tout de même assez différentes.

Par exemple, deux vins à près de 20$, (suite…)

Note de dégustation: Capitel Foscarino 2003, IGT Veneto, Anselmi

Les années très chaudes n’offrent habituellement pas un fort potentiel de vieillissement. Si les années fraîches peuvent manquer de coffre, les années de canicule manquent de cette acidité cruciale pour la vitalité à long terme d’une bonne cuvée. C’est pourquoi bien des vins ultra-mûrs, riches et très fruités, s’ils sont séduisants en jeunesse, perdent souvent beaucoup de tonus en relativement peu de temps.

Exemple en blanc, le Capitel Foscarino 2003 de la maison Anselmi, fait majoritairement de garganega avec un peu de trebbiano, offre à cinq ans de belles rondeurs, des saveurs de miel et de pomme cuite, une touche de fumée et un doré attrayant. Mais cet IGT Veneto (suite…)

Published in: on 30 décembre , 2009 at 11:39  Comments (2)  
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Red Angel on the Moonlight 2006, pinot noir, IGT Venezia Giulia, Jermann

C’est bien mon genre, ça. À la recherche de quelque chose de différent, je prends un vin au hasard : un rouge d’un producteur de Vénétie Julienne, à l’étiquette intrigante, au nom tout à fait distinctif d’Ange Rouge au clair de lune, et intrigant aussi parce qu’il s’agit d’un pinot noir hors de ses zones traditionnelles de confort. En faisant mes recherches pour en savoir plus, au moment d’ouvrir la bouteille, je m’aperçois que le producteur en question, Sylvio Jermann, est avant tout reconnu pour ses blancs. Les meilleurs blancs d’Italie, selon certains.

Découvrir un producteur de blanc par les rouges, voilà le genre de détours que j’apprécie et qui accentue, ici et là, mon cheminement dans le vin. Les chemins de traverse, j’aime bien.

Ceci dit, en découvrant le vigneron ainsi, est-ce que je serais rentré au château par les dépendances, plutôt que par l’escalier monumental? En tout cas, le vin n’a pas l’air d’une arrière-pensée. Et il est tout à fait particulier.

Rond et agréable, mais avec une profondeur certaine, le Red Angel on the Moonlight offre des arômes intenses et invitants, avec d’intrigantes notes végétales, bien intégrées à un tout harmonieux. En bouche, une belle présence, une souplesse intéressante, des saveurs attrayantes de fruits rouges et toujours ces notes herbacées, un peu d’épices, mais aussi une substance et des tannins atypiques par leur ampleur.

Ce caractère atypique s’explique certainement par la présence de 15% de cabernet et de merlot – un détail qui explique aussi l’intrigante formulation de « Vino rosso a base di uve pinot nero », vin rouge à base de pinot noir, inscrite au bas de l’étiquette. C’est tout de même le caractère du pinot qui domine. Et l’assemblage, s’il est peu courant, n’a rien d’une anomalie, puisque le tout est assez harmonieux.

Le seul ennui, c’est que c’est le genre de vin qui fait dépenser. Après avoir dégusté ce vin qui sort de l’ordinaire, j’aurai le goût d’y retourner, de laisser vieillir une ou deux bouteilles et surtout, de goûter ces blancs dont on dit tant de bien (voir cette note de l’excellent Jamie Goode, sur le blog Wine Anorak). Ça tombe bien, plusieurs des vins de Sylvio Jermann sont présentement disponibles – en petites quantités, mais à plusieurs endroits – dans les succursales de la Société des alcools. Une idée de cadeau de Noël, peut-être?

Vente aux enchères de vins fins sur Internet : la deuxième fois est la bonne

Le printemps dernier, j’avais écrit un billet sur une vente aux enchères organisée par l’Hôtel des encans de Montréal, avec la Société des alcools du Québec, pour le compte du propriétaire du restaurant Les Chenêts. Je m’étais posé quelques questions, à l’époque, sur la répartition un peu particulière des millésimes et des choix de vins, en me disant que le vendeur avait gardé plusieurs belles bouteilles par devers lui.

Et pour cause. C’est qu’à la lumière de la deuxième vente organisée par le même trio, on serait tenté de penser que la première vente était une sorte de test de marché. De 400, le nombre de lots est passé à 1200, la qualité des lots et le caractère exceptionnel des crus grimpant d’autant.

Cette fois, naviguer au travers des lots devient un véritable magasinage de rêve. Des Mouton-Rothschild de plusieurs millésimes, incluant celui dont l’étiquette a été peinte par Riopelle. Même chose pour les Yquem et pour un paquet d’autres solides liquoreux de Sauternes, ainsi que quelques lots de champagne qui montent facilement à la tête. Des vins du Domaine de la Romanée-Conti en formats et années diverses. Des châteauneuf-du-pape de haut vol, comme des Beaucastel d’une vingtaine d’années et quelques bouteilles du rare et exceptionnel Rayas. Sans compter d’autres vins moins chers mais tout aussi attrayants, comme le Moulin Touchais, le Pesquera ou le Farnito.

En prime, les lots sont de tailles variables, ce qui laisse la chance à des gens aux bourses moins bien garnies de rêver un peu – voire d’acheter un grand cru. Parfois, il y a une douzaine de bouteilles par lot, parfois une seule. Les plus riches pourront viser la dizaine de Mouton-Rothschild des années 80, mais un autre sera peut-être très heureux de mettre la main sur un lot comptant une seule bouteille de ce vin d’exception.

On trouve aussi de très vieilles bouteilles, avec un Lafite-Rothschild 1890 et un Calon-Ségur du légendaire millésime 1900. Dans d’autres cas, il faut toutefois se méfier. Le vin a beaucoup baissé, a pris des couleurs assez étonnantes et sera vraisemblablement très altéré. Dans ces cas, on voudrait la bouteille comme objet, plus que comme projet de dégustation.

D’ailleurs, voilà une question essentielle à se poser, si jamais vous voulez passer du rêve à la réalité. Pourquoi voudriez-vous un lot en particulier ? Pour le boire, ou simplement comme trophée ?

Le catalogue est en ligne maintenant. Les enchères s’ouvrent le 1er septembre et se poursuivent jusqu’au 10 septembre: la fermeture des lots se fera en trois temps, à partir du 8 septembre. Ça vous laisse le temps d’y penser.

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