Comment trouver à boire sur son iPhone (ou iPod) au Québec

Québécois, Québécoises, vous cherchez quoi boire cette fin de semaine et où passer l’acheter? Pour citer un certain slogan: il y a une application pour ça.

En fait, il y en a même deux.

La première nous provient de la SAQ elle-même, via la très créative agence Sid Lee.

Gratuite, elle permet de trouver une succursale par géolocalisation (bref, en trouvant où vous êtes au moment de votre recherche, on vous présentera les succursales les plus proches sur une carte), mais aussi de trouver des produits selon divers critères et de connaître leur disponibilité… de façon limitée.

On peut, par exemple, (suite…)

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Courrier vinicole La relève France-Espagne: c’est quoi au juste la relève?

Si vous êtes amateurs de belles bouteilles, il vous reste jusqu’à minuit, lundi soir (23 novembre) pour placer votre commande au Courrier Vinicole La Relève France | Espagne, un catalogue au principe original, qui offre, comme d’habitude, un choix de cuvées intéressantes, parfois rares et pas toujours à des prix stratosphériques. Innovation appréciable – un retour, en fait, après quelques incompréhensibles années de recul technologique – on peut faire sa commande par Internet. Au lieu de se courir un télécopieur ou de se chercher un timbre (on s’en sert si souvent, de nos jours…), voilà que vous pourrez procéder de façon instantanée. Il était temps!

Ceci dit, ce Courrier Vinicole consacré à « La Relève France | Espagne » me laisse un brin perplexe.

Un peu comme c’était le cas pour les Pastilles de goût, le problème n’est pas tellement dans le concept, mais plutôt dans l’exécution.

Pour la plupart des gens, la relève, c’est la jeunesse, la nouveauté, ceux et celles qui percent, qui renouvellent fraîchement les domaines, les régions où ils travaillent. Le jeune groupe qui explose sur la scène musicale avec un son inédit. L’entrepreneur fraîchement sorti de l’université qui innove et trouve sa place sur le marché. Le vigneron qui change la direction d’un domaine ou crée le sien et montre rapidement une grande promesse. C’est ce qu’on laisse entendre dans la présentation du catalogue, constitué de «51 produits issus d’une nouvelle génération».

Mais la relève, ce n’est donc pas le milieu de carrière – ni, évidemment, l’expérience du vétéran. D’un point de vue personnel, je ne suis pas vieux, il me reste un bon quart de siècle de carrière devant moi, mais je rigolerais franchement si on me disait que je fais partie de la relève.

Après vingt ans aux commandes du domaine familial, Michel Chapoutier fait-il vraiment encore partie de la "relève"?

C’est pourquoi je sursaute en voyant que la Relève définie par l’équipe du Courrier Vinicole inclut Michel Chapoutier, qui a repris le domaine de son grand-père il y a bientôt vingt ans, Étienne de Montille, qui vinifie les vins du domaine familial depuis 1989 (et qui sera de passage à Montréal Passion Vin, la fin de semaine prochaine), ou encore Pascal Chatonnet, qui oeuvre dans le vin depuis les années 80 et qui a mis le Château La Sergue en route en 1996. Autre exemple, on présente Jean-Bernard Larrieu comme la relève du Clos Lapeyre, dans le Jurançon, en précisant qu’il «a débuté en 1985 à l’âge de 22 ans».

Je reste aussi perplexe en voyant Emmanuel Cazes, jeune relève du Domaine Cazes, certes, mais représenté par un vin doux naturel de 1990 qu’il n’a certainement pas vinifié lui-même. Du côté des Moueix, même problème avec un Château Bélair 2000, qu’on lit à Édouard Moueix, fils de Christian, entré dans l’entreprise familiale en… 2002 et à Bélair lors de l’acquisition par les Établissements Moueix en… 2008.

Même hésitation devant le Silex 2007 de Didier Dagueneau: Louis-Benjamin et Charlotte Dagueneau sont maintenant aux commandes du domaine familial, mais le 2007, c’était encore le vin du paternel, mort en septembre 2008.

Entre le Silex ou le Volnay des de Montille, ce n’est surtout pas la qualité des bouteilles qui me pose problème. La Sergue, pour l’avoir goûté le printemps dernier, est un excellent vin et un très bon rapport qualité-prix, à 45$. Je suis sûr que Bélair 2000 est loin d’être de la piquette. Mais que font-ils dans un catalogue de « La Relève »?

Avec un concept aussi dilué, on perd l’occasion de pointer vraiment, avec un véritable travail de recherche, les vignerons qui sont à définir l’avenir du vin, ceux qui arrivent fraîchement sur la scène et qui sont à créer les grands vins de demain. Là, on aurait peut-être fait de parler de familles du vin ou de générations, tous simplement, puisqu’on finit par simplement illustrer le processus traditionnel de succession, dans d’innombrables domaines viticoles.

Il se pourrait très bien que je cède à la tentation en achetant un Hermitage de Yann Chave à 33$, le Jurançon La Magendia de Lapeyre au même prix, un Mas Karolina du Roussillon à 23$, ou encore un Auxey-Duresses d’Estelle Prunier à 55$. Je ne vais pas bouder mon plaisir à cause d’un flou dans les définitions. Mais j’aimerais bien que l’on soit un peu plus précis dans les concepts, ceci dit: que dirait-on si un catalogue Nouveau Monde nous offrait des Bourgogne et des Brunello en nous disant qu’ils sont de style nouveau monde?

 

La pastille entre les dents: quand la SAQ essaie de définir vos goûts

Peut-on définir un vin par une simple pastille et deux qualificatifs? La Société des alcools parie que oui.

Pour être plus juste, disons plutôt que le monopole québécois des vins et spiritueux cherche, avec son nouveau système de « Pastilles de goût », à offrir aux consommateurs un guide simple et facile pour trouver un vin à leur goût et à mieux identifier les mets à marier à la bouteille. Huit pastilles, au total: quatre pour les blancs, quatre pour les rouges, passant du plus léger au plus corsé.

Devant le côté parfois intimidant du monde des vins, l’intention est excellente, louable, potentiellement intéressante. Après tout, si un passionné de vin entre à la SAQ à la recherche d’un pinot noir, voire même d’un mercurey, voire encore d’une cuvée particulière de cette appellation, la plupart des consommateurs se cherchent un rouge qui ira bien avec les pâtes du soir, ou un blanc pour les truites que le beau-frère a pêché et gentiment partagé. Cépage? Appellation? Pas sûr qu’il ou elle ait toujours des idées très précises à ce sujet. Une échelle de goûts à quatre « barreaux », c’est potentiellement un bon guide, pour commencer – ou pour accroître le plaisir du buveur débutant (ou distrait).

Mis à l’essai depuis plusieurs mois dans quelques nouvelles succursales de la Société, le concept a été intégré aux recherches sur SAQ.com au début de l’été. Depuis le weekend dernier, il a été lancé en grande pompe dans tout le réseau. La circulaire SAQ du mois est tout entière consacrée à ce nouveau concept, mettant l’accent sur une sélection de vins de chaque catégorie, et offrant même des coffrets dégustation pour tester, à l’aide de quatre petites bouteilles, la nature de chaque pastille. Ajoutons à ça un questionnaire en ligne pour trouver « votre » pastille, ainsi que des dégustations en succursale, et on voit vite que le monopole met le paquet pour positionner son concept.

(En passant, j’ai fait le questionnaire, pour les rouges, et le site m’a répondu « Vous êtes fruité et généreux ». Je prends le compliment, pour la générosité, mais je dois dire que je ne me suis jamais considéré comme fruité. Faudrait que je demande à ma blonde… Entéka.)

La bonne pastille pour le bon vin

Évidemment, si on veut que le système fonctionne, il faut que les vins désignés par une pastille correspondent vraiment au profil annoncé. Or, après avoir exploré un peu le répertoire offert, pas sûr que l’alignement est tout à fait bien réglé.

En regardant la circulaire de la SAQ claironnant l’arrivée généralisée des pastilles dans les succursales, je m’étais retrouvé assez sceptique devant le classement réservé au riesling McWilliams Hanwood Estate 2008, un des vins vedette de l’opération. La pastille? Fruité et doux.

Fruité et doux? Un riesling australien?

Dans la liste des vins classés Fruité et Doux (la pastille bleu oeuf de pigeon),  on retrouve des rieslings allemands, du chardonnay en cannette australien Billy Rock (qui est tellement fruité et doux qu’il en est même sucré), du pinot grigio californien, voire même du vin de glace L’Orpailleur. Pour tous ces vins, aucun mal à croire que le terme s’applique.

Mais un riesling australien, normalement, ça vous accueille avec une acidité saisissante, de la minéralité, des agrumes. Parfumé, oui. Fruité? Pas tellement. Doux? Pas pantoute.

Le McWilliams aurait-il été atypique? J’en ai acheté une bouteille, pour en avoir le coeur net. Et vous savez quoi, l’acidité aurait de quoi vous décaper les dents. Les parfums sont sur le zeste de lime et de citron, le fruit de la passion, la trame est serrée et minérale. Moi, j’adore ça. J’ai bu ça à grand soif, avec une tarte au fromage et à la courgette, l’acidité et le côté vif venant bien couper le gras des oeufs et du fromage.

Mes notes de dégustation rejoignent d’ailleurs celles de Julien Marchand et celles du Méchant Raisin sur le millésime 2006. Et celles de la maison McWilliams. Même celles de la SAQ mettent l’accent sur les agrumes, la minéralité et la nervosité. Il y a peut-être du sucre résiduel, mais si c’est le cas, on ne le sent pas du tout.

J’insiste, ce n’est pas un vin doux et le consommateur néophyte qui se fierait à la pastille pourrait être très surpris et potentiellement, voir ses attentes déçues.

Bref, on l’enverrait plus facilement vers la pastille jaune, celle des vins fruités et vifs, avec le riesling de Hugel, toujours bien sec et vif, et avec la plupart des chablis qui sont classés là. Si on avait besoin d’y faire de la place, on pourrait toujours échanger le Gros Manseng/Sauvignon blanc gascon d’Alain Brumont ou le San Vincenzo d’Anselmi, deux vins que je connais bien et qui m’apparaissent beaucoup plus proches du fruité et doux que le McWilliams.

Si le classement des rouges me semble généralement plus approprié, il y a là aussi des exceptions. Les Cahors et les primitivo iraient vraiment dans l’aromatique et souple plutôt que dans le fruité et généreux? Et ne pourrait-on pas dire l’inverse pour le Teroldego Mezzacorona ou le Proprietor’s Red de Jackson-Triggs (un vin qui n’est d’ailleurs pas vraiment de l’Ontario, mais fait à majorité de vins achetés en vrac à l’étranger et coupés d’eau, soit dit en passant)?

Bref, le système a clairement ses limites.

Loin de moi l’idée de le condamner intégralement. Je le répète, l’idée est bonne, pour un public non averti. Si ça permet à un plus grand nombre de gens de s’initier agréablement aux plaisirs du vin, je suis pour. Et je souhaite sincèrement que ce soit le cas.

Toutefois, pour que le système fonctionne, les choix doivent être véritablement fidèles à ce que la pastille promet. D’autant plus que les catégories ne sont peut-être pas tout à fait évidentes, au départ. Le registre allant de léger à corsé, par exemple, est décrit essentiellement, dans les explications audio-visuelles données par un conseiller virtuel, lors du questionnaire en ligne, comme étant un passage du moins au plus asséchant. Je comprends qu’on veut parler du caractère tannique des vins, mais un vin très corsé et puissant, s’il est bien fait, ne devrait rien avoir d’asséchant. Pas sûr que cette description est nécessairement une bonne pub pour les vins « aromatiques et charnus ».

Le consommateur, s’il peut se fier globalement aux catégories offertes, ne doit pas y aller totalement à l’aveuglette. À chacun de bien goûter les vins achetés à partir d’une catégorie, pour voir s’il correspond bien à ses goûts et à la description. Le vin est-il fruité et léger, par exemple? Peut-être bien, mais ses arômes, sa concentration, sa texture, ses tannins – bref, sa personnalité – devraient le différencier d’autres vins de la même catégorie. Et c’est en notant et en appréciant ces différences que l’on peut partir sur le chemin de la découverte pour laisser derrière soi les pastilles, au profit d’une appréciation plus personnelle et plus raffinée.

Allez, je vous laisse. J’ai justement envie d’un vin généreux, aromatique, souple et charnu…

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