Peut-on définir un vin par une simple pastille et deux qualificatifs? La Société des alcools parie que oui.
Pour être plus juste, disons plutôt que le monopole québécois des vins et spiritueux cherche, avec son nouveau système de « Pastilles de goût », à offrir aux consommateurs un guide simple et facile pour trouver un vin à leur goût et à mieux identifier les mets à marier à la bouteille. Huit pastilles, au total: quatre pour les blancs, quatre pour les rouges, passant du plus léger au plus corsé.
Devant le côté parfois intimidant du monde des vins, l’intention est excellente, louable, potentiellement intéressante. Après tout, si un passionné de vin entre à la SAQ à la recherche d’un pinot noir, voire même d’un mercurey, voire encore d’une cuvée particulière de cette appellation, la plupart des consommateurs se cherchent un rouge qui ira bien avec les pâtes du soir, ou un blanc pour les truites que le beau-frère a pêché et gentiment partagé. Cépage? Appellation? Pas sûr qu’il ou elle ait toujours des idées très précises à ce sujet. Une échelle de goûts à quatre « barreaux », c’est potentiellement un bon guide, pour commencer – ou pour accroître le plaisir du buveur débutant (ou distrait).
Mis à l’essai depuis plusieurs mois dans quelques nouvelles succursales de la Société, le concept a été intégré aux recherches sur SAQ.com au début de l’été. Depuis le weekend dernier, il a été lancé en grande pompe dans tout le réseau. La circulaire SAQ du mois est tout entière consacrée à ce nouveau concept, mettant l’accent sur une sélection de vins de chaque catégorie, et offrant même des coffrets dégustation pour tester, à l’aide de quatre petites bouteilles, la nature de chaque pastille. Ajoutons à ça un questionnaire en ligne pour trouver « votre » pastille, ainsi que des dégustations en succursale, et on voit vite que le monopole met le paquet pour positionner son concept.
(En passant, j’ai fait le questionnaire, pour les rouges, et le site m’a répondu « Vous êtes fruité et généreux ». Je prends le compliment, pour la générosité, mais je dois dire que je ne me suis jamais considéré comme fruité. Faudrait que je demande à ma blonde… Entéka.)
La bonne pastille pour le bon vin
Évidemment, si on veut que le système fonctionne, il faut que les vins désignés par une pastille correspondent vraiment au profil annoncé. Or, après avoir exploré un peu le répertoire offert, pas sûr que l’alignement est tout à fait bien réglé.
En regardant la circulaire de la SAQ claironnant l’arrivée généralisée des pastilles dans les succursales, je m’étais retrouvé assez sceptique devant le classement réservé au riesling McWilliams Hanwood Estate 2008, un des vins vedette de l’opération. La pastille? Fruité et doux.
Fruité et doux? Un riesling australien?
Dans la liste des vins classés Fruité et Doux (la pastille bleu oeuf de pigeon), on retrouve des rieslings allemands, du chardonnay en cannette australien Billy Rock (qui est tellement fruité et doux qu’il en est même sucré), du pinot grigio californien, voire même du vin de glace L’Orpailleur. Pour tous ces vins, aucun mal à croire que le terme s’applique.
Mais un riesling australien, normalement, ça vous accueille avec une acidité saisissante, de la minéralité, des agrumes. Parfumé, oui. Fruité? Pas tellement. Doux? Pas pantoute.
Le McWilliams aurait-il été atypique? J’en ai acheté une bouteille, pour en avoir le coeur net. Et vous savez quoi, l’acidité aurait de quoi vous décaper les dents. Les parfums sont sur le zeste de lime et de citron, le fruit de la passion, la trame est serrée et minérale. Moi, j’adore ça. J’ai bu ça à grand soif, avec une tarte au fromage et à la courgette, l’acidité et le côté vif venant bien couper le gras des oeufs et du fromage.
Mes notes de dégustation rejoignent d’ailleurs celles de Julien Marchand et celles du Méchant Raisin sur le millésime 2006. Et celles de la maison McWilliams. Même celles de la SAQ mettent l’accent sur les agrumes, la minéralité et la nervosité. Il y a peut-être du sucre résiduel, mais si c’est le cas, on ne le sent pas du tout.
J’insiste, ce n’est pas un vin doux et le consommateur néophyte qui se fierait à la pastille pourrait être très surpris et potentiellement, voir ses attentes déçues.
Bref, on l’enverrait plus facilement vers la pastille jaune, celle des vins fruités et vifs, avec le riesling de Hugel, toujours bien sec et vif, et avec la plupart des chablis qui sont classés là. Si on avait besoin d’y faire de la place, on pourrait toujours échanger le Gros Manseng/Sauvignon blanc gascon d’Alain Brumont ou le San Vincenzo d’Anselmi, deux vins que je connais bien et qui m’apparaissent beaucoup plus proches du fruité et doux que le McWilliams.
Si le classement des rouges me semble généralement plus approprié, il y a là aussi des exceptions. Les Cahors et les primitivo iraient vraiment dans l’aromatique et souple plutôt que dans le fruité et généreux? Et ne pourrait-on pas dire l’inverse pour le Teroldego Mezzacorona ou le Proprietor’s Red de Jackson-Triggs (un vin qui n’est d’ailleurs pas vraiment de l’Ontario, mais fait à majorité de vins achetés en vrac à l’étranger et coupés d’eau, soit dit en passant)?
Bref, le système a clairement ses limites.
Loin de moi l’idée de le condamner intégralement. Je le répète, l’idée est bonne, pour un public non averti. Si ça permet à un plus grand nombre de gens de s’initier agréablement aux plaisirs du vin, je suis pour. Et je souhaite sincèrement que ce soit le cas.
Toutefois, pour que le système fonctionne, les choix doivent être véritablement fidèles à ce que la pastille promet. D’autant plus que les catégories ne sont peut-être pas tout à fait évidentes, au départ. Le registre allant de léger à corsé, par exemple, est décrit essentiellement, dans les explications audio-visuelles données par un conseiller virtuel, lors du questionnaire en ligne, comme étant un passage du moins au plus asséchant. Je comprends qu’on veut parler du caractère tannique des vins, mais un vin très corsé et puissant, s’il est bien fait, ne devrait rien avoir d’asséchant. Pas sûr que cette description est nécessairement une bonne pub pour les vins « aromatiques et charnus ».
Le consommateur, s’il peut se fier globalement aux catégories offertes, ne doit pas y aller totalement à l’aveuglette. À chacun de bien goûter les vins achetés à partir d’une catégorie, pour voir s’il correspond bien à ses goûts et à la description. Le vin est-il fruité et léger, par exemple? Peut-être bien, mais ses arômes, sa concentration, sa texture, ses tannins – bref, sa personnalité – devraient le différencier d’autres vins de la même catégorie. Et c’est en notant et en appréciant ces différences que l’on peut partir sur le chemin de la découverte pour laisser derrière soi les pastilles, au profit d’une appréciation plus personnelle et plus raffinée.
Allez, je vous laisse. J’ai justement envie d’un vin généreux, aromatique, souple et charnu…
je suis totalement… en accord avec vous.
Le concept des pastilles est limitatif. On ne peut réduire les vins et surtout le goût à une catégorie, même ronde comme une pastille.
Et cela induit en erreur le consommateur qui va tenter d’adapter son goût à la définition imposée par la SAQ. Le contraire de la connaissance du vin!
La SAQ n’est pas la seule qui utilise cette pratique. Le restaurant l’Aviatic Club, à Québec, utilise un système similaire pour la classification de sa carte des vins. Les catégories ne sont pas les mêmes toutefois, et c’est plutôt amusant de les comparer à celles de la SAQ:
Blancs:
– Francs et sponatnés (muscadet, st-bris, pniot grigio, 2x sauvignon blanc)
– Frais et parfumés (3x Sauvignon Blanc, Gewurtz, Riesling)
– Abondants et onctueux (5x Chardonnay, Crozes-Hermitage, Sicilia IGT)
Rouge:
– Délicats et charmeurs (5x Pinot noir, gamay)
– Vifs et fringants (1/2 Cabernet Sauvignon, 1/2 Merlot)
– Généreux et authentiques (Syrah, Australie, etc.)
– Vigoureux et athlétiques (Zin, Malbec, Shiraz, etc.)
Autres
– Doux et liquoreux
Je sais bien que leur échelle n’est pas la même car ils n’ont pas autant de produits et beaucoup moins de personnel à qui bien inculquer comment utiliser le système. Je pense toutefois qu’à cette échelle ça peut réussir assez bien, surtout lorsque la clientèle veut simplement choisir un verre qui va bien avec le plat qui lui est proposé (avec l’assistance du serveur)…
Personnellement, je pense que le système risque de causer un peu plus de frustrations que nécessaire et je crois qu’il ne s’agit que 2-3 mauvaises expériences pour que le consommateur moyen perde confiance en ce système et revienne à ses bonnes vieilles habitudes d’achat…
L’important, dans les deux cas, c’est que ça aide véritablement. Or, si le vin ne correspond pas à sa description, à la SAQ ou à l’Aviatic, c’est là que le bât blesse.
Au moins, au restaurant, le personnel est là pour accompagner et suivre l’application de la pastillade de plus près… À la SAQ, le client frustré se trouve un peu dépourvu, une fois à la maison, s’il trouve que ça ne colle pas.
[…] trop agressifs. On ne pourrait s’opposer à la classification par la SAQ de ce vin comme Fruité et Généreux, car il en donne effectivement beaucoup pour son prix. À déguster avec un bon spag, un mercredi […]
En mars 2007, Philippe Raoux, viticulteur et négociant, a ouvert le premier site d’oenotourisme de ce type en France: La Winery. En plein coeur du Médoc, il propose de découvrir le vin autrement à travers la gastronomie et l’art.
La cave de la Winery compte pas moins de 1500 références du monde entier, un véritable temple du vin au milieu de cette région viticole.
Et pour couronner le tout et pour répondre à l’objectif principal de Philippe Raoux qui est de désacraliser le monde du vin et de décomplexer la dégustation, il propose aux visiteurs de découvrir leur Profil de dégustateur à travers le Signe Oenologique®.
Durant une séance d’une heure orchestrée par un sommelier, les visiteurs dégustent 6 vins à l’aveugle et répondent également à des questions sur leurs habitudes de consommation et d’achat de vins.
Ils notent les vins de 1 à 5 selon s’il les ont plus ou moins appréciés et répondent aux questions grâce à des boitiers de vote interactifs.
A la fin de la séance, le logiciel exclusif du Signe Oenologique® analyse les réponses de chacun, et chaque participant reçoit son livre de cave personnalisé dans lequel figurent son Signe Oenologique, son Ascendant, son profil oenologique, les cépages qui correspondent à ses goûts , ainsi qu’une liste de vins qu’il sera sûr d’apprécier.
Il existe 8 signes oenologiques, correspondant chacun à un profil de dégustateur bien précis: musclé, gourmand, sensuel, esthète, explorateur, …
8 signes + 8 ascendants = 64 combinaisons de profils oenologiques possibles!
Le concept a été établi par Frédéric Brochet, Docteur en Biochimie et en Œnologie et auteur de la première thèse sur la dégustation. Pour cela il s’est entouré d’une équipe de chercheurs spécialistes de l’analyse sensorielle.
Le concept, avec plus de 11.000 participants en 2 ans, a connu un tel succès, que Philippe Raoux a fondé la Wine Sign Company pour exporter le concept en France et à l’étranger chez des cavistes, hôteliers, restaurateurs, clubs d’oenologie…
Pour plus d’infos: http://www.winery.fr
et http://www.wine-sign.com
Intéressant de voir les approches de classification de l’Aviatic Club comme de La Winery. Un signe des différentes façons dont on peut trancher le saucisson gustatif et aromatique, pour ainsi dire.
Dans tous les cas, ces profils restent une première approche. Qu’on voie les choses en 8 pastilles ou en 64 combinaisons, ça reste simpliste, par rapport à la réelle complexité et subtilité du vin. Bref, on peut commencer avec de tels repères, mais après, il faut aller plus loin.
Pour connaître les deux concepts, je peux vous assurer que la démarche du Signe Oenologique va au delà de celle des pastilles…
Ils ont mis 3 ans à le développer. Il a été pensé plus que l’histoire des pastilles qui semble avoir été fait a la va vite…
Le monde du vin est en effet très complexe et puisque le consommateur cherche des repères, il découvre là les vins qu’il aime, après avoir dégusté des vins sans savoir ce que c’était et après avoir répondu à plusieurs questions sur ses habitudes de conso.
Alors, bien sûr ce concept ne peut pas s’appliquer à tous les circuits de distribution. Pour le moment, le participant qui découvre son Signe Oenologique se dirige ensuite vers la gigantesque cave de la Winery et il a le choix parmi des milliers de références. Les vins qui figurent dans son livre de cave sont dans cette cave…
Tous les vins de la cave ont un Signe Oenologique. Il y en a vraiment pour tous les goûts…
moi je suis séduite par ce concept et le nombre de visiteurs croissant ainsi que la création de THE WINE SIGN COMPANY en démontrent le sérieux et le succès…
d’ailleurs si vous allez voir le site http://www.wine-sign.com vous allez voir que le caviste Fauchon a implanter le concept chez lui pour se diversifier, vendre ses vins d’une manière différente…
[…] de dégustationSi le concept des pastilles vise d’avantage l’amateur moyen pour l’inciter à s’aventurer vers de […]
[…] mais il fait amplement ce qu’on attend de lui et est un très bon rapport qualité-prix. Initialement classé sous la pastille « Fruité et doux », il a heureusement été correctement reclassé dans « Fruité et Vif » et […]