Vous avez déjà entendu parler du grenache gris? Probablement pas. Voilà un cépage dont on dit bien peu de choses, à part qu’il entre dans la composition des vins gris de Listel, et qu’il est apparenté aux grenaches rouges et blancs (oh surprise!). La définition dans Wikipedia est limitée et, à ma grande surprise, le célèbre Oxford Companion to Wine de Jancis Robinson n’offre même pas d’entrée propre à ce cépage qui, pourtant, du haut de ses 2600 hectares cultivés en France, le mériterait amplement.
La minéralité extraordinaire des grenaches gris de vieilles vignes, leurs arômes tranchants et puissants donnant sur le caramel brûlé, l’amande amère, le fenouil et l’abricot séché (voire le caoutchouc chauffé), voilà autant de caractéristiques extraordinaires qui ne s’effacent pas quand on y ajoute une mesure de grenache blanc, de macabeu, voire de marsanne ou de roussanne. Rien ne ressemble à ça. Et peu de blancs sont aussi costauds, quand vient le temps de les boire à table.
Par exemple, on dit fréquemment que les asperges offrent un mariage difficile avec le vin, la saveur particulière de ces grands machins verts tassant facilement celles des rouges comme des blancs. Le grenache gris ne s’incline absolument pas devant l’asperge et le mariage des deux est particulièrement intense. Des vins de ce cépage ont aussi bien tenu la route avec des poissons grillés qu’avec un poulet fermier, des fromages ou du homard. J’en essaierai avec des grillades, l’été, le côté « brûlé » du cépage ayant certainement de quoi s’arrimer au grillé d’une côtelette de porc ou même d’un steak de boeuf. J’ai confiance, quoi.
Le Roussillon est un bastion de ce cépage et la totalité des vins de grenache gris que j’ai dégustés au cours des derniers mois proviennent de là. Le plus intense est sans doute le collioure blanc de Coume del Mas (80% de grenache gris, 10% grenache blanc, 10% vermentino), qui tire au maximum la matière et le côté chaud du cépage – peut-être un peu aux dépens de la finesse et des nuances.
J’ai aussi eu un grand bonheur en dégustant une bouteille de la cuvée Milouise 2006 de Jean-Philippe Padié (moitié-moité grenache gris et grenache blanc), le blanc venant ajouté du fruité et des arômes mielleux au vigoureux gris, sans pour autant en émousser le tranchant et la vivacité. Un vin très droit, précis et élégant, qui reflète bien son terroir exigeant.
Mon favori demeure toutefois le Matassa blanc, dont les 70% de gris sont parfumés par un beau 30% de macabeu, le tout provenant de très vieilles vignes profondément ancrées dans le schiste des montagnes du pays catalan. Ampleur, acidité vive, précision des saveurs, puissance et finesse s’y conjuguent à merveille, dans un ensemble qui en a pour des années, voire des décennies à révéler tout son potentiel. Je sais, je sais, je reviens de chez le producteur, Tom Lubbe, que je considère comme un ami, mais c’est avant tout parce qu’il faisait des cuvées aussi saisissantes que j’ai voulu aller chez lui en apprendre plus sur le vin. Goûtez, vous m’en reparlerez.
En cherchant un peu, parmi les vins du Languedoc-Roussillon, vous réussirez certainement à dénicher des vins comportant une bonne part de ce cépage aussi sous-estimé que le carignan l’est en rouge. Au Québec, parmi les vins mentionnés ci-haut, le Coume del Mas est importé par Plan Vin et le Matassa par Insolite Importation. La Milouise de Padié n’y est pas encore, mais elle a été appréciée, en dégustation, par les sommeliers de l’Utopie, qui se sont mis depuis peu à l’importation de vins. Histoire à suivre.
bonjour,
plusieurs autres vignerons font des vins de grenaches gris pour ma part de bonnes adresses à partager : clos de l’origine à Maury les quilles libres blanc, le vin de voile du même domaine qui ne peut laisser indifférent …! la petite baigneuse à Maury avec grain de soleil, domaine yoyo à Banyuls avec Restaké, le soleil de midi de Ombre et Soleil avec une oxydation intéressante à Tautavel et esprit de grèle vin de liqueur, blanc bec de fred rivaton avec macabeu et carignan blanc… et tous ces vins sont sans soufre ajouté ou presque . De quoi les gouter tous sans craindre le mal de tête du lendemain
. Revenez faire un tour dans le Roussillon et Bonne dégustation
Depuis ce billet, publié il y a presque trois ans, déjà, j’ai eu l’occasion de découvrir bien d’autres vignerons et vins du Roussillon, comme en témoigne notamment ce billet publié au printemps. J’ai même découvert un producteur de grenache gris en Californie, a Donkey and Goat, qui en fait un superbe rosé.
Je prends note des vins de grenache gris que vous mentionnez. Plusieurs m’ont échappé à ce jour. Et il n’y a jamais trop de bons vins de grenache gris…
Il faut aussi goûter l’exceptionnelle cuvée « Symphonie » (70 % de grenache gris et 30 % du rare grenache blanc) du domaine DEPEYRE à 66600 Cases de Pène;
alain DEVANLAY
Je vous conseille également le 100% Grenache Gris de chez Ferrer Ribière !!! Une pointe d’élevage oxydatif donne à se vin une complexité qui nous donne enfin des sensations et aussi la possibilité de trouver de magnifiques accords mets et vins …
Clément T